Par ROBERT WALKER

Activités familiales le week-end dans une aire collective de jeux à Taizhou (Jiangsu),le 5 mars 2023.

Lorsque la Chine a annoncé pour la première fois son intention de parvenir à une prospérité commune dans leQuotidien du Peupledu 25 septembre 1953,le concept ressemblait à un rêve impossible.Le pays était à 87 % rural,avec une proportion similaire de la population extrêmement pauvre et un taux d’alphabétisation dépassant à peine 20 %.

Aujourd’hui,avec un taux d’alphabétisation de 99,8 % et l’éradication de l’extrême pauvreté,la prospérité commune n’est plus un rêve,mais un objectif politique ferme.Cependant,cet objectif ne peut être atteint par le gouvernement chinois seul.Comme pour l’éradication de la pauvreté,sa réalisation nécessitera le soutien et la mobilisation active de l’ensemble de la population chinoise.

L’éradication de la pauvreté a pris des décennies au pays.En 1986,alors que l’ouverture économique de la Chine en était à ses débuts,une structure nationale de lutte contre la pauvreté a été mise en place sous l’égide du Conseil des affaires d’état.Des politiques holistiques ont été mises en ?uvre à tous les échelons administratifs,et la société s’est engagée à les soutenir.

Des organisations de masse,à l’instar de la Ligue de la jeunesse communiste de Chine et de la Fédération nationale des femmes de Chine,ont été immédiatement encouragées à concevoir des actions telles que l’amélioration de la scolarisation dans les villages.à partir de 1994,les ministères du gouvernement central étaient tenus d’aider les districts désignés,tandis que les agences gouvernementales des niveaux inférieurs étaient chargées des cantons et des villages.

Une restructuration fondamentale de la gouvernance mondiale est nécessaire pour que les bénéfices de la croissance économique mondiale soient partagés plus équitablement et qu’une prospérité commune pour tous devienne réalité.

En 2015,le président Xi Jinping a réitéré l’engagement de la Chine à éradiquer la pauvreté d’ici à 2020 et,au cours de la période qui a suivi,les entreprises publiques ont soutenu des programmes de lutte contre la pauvreté couvrant plus de 10 000 villages.De même,plusieurs milliers d’entreprises privées ont aidé plus de 10 000 entreprises rurales dans autant de villages.Cette mobilisation a été facilitée par la démocratie populaire à processus complet de la Chine,qui peut engager tout le monde dans un effort commun.

Une forte croissance économique a grandement contribué à l’élimination de la pauvreté rurale.Cependant,cela a créé une répartition des revenus en forme de pyramide avec relativement peu de riches au sommet et beaucoup de personnes à faible revenu en dessous.Pour parvenir à une prospérité commune,il faut que les bénéfices de la croissance soient partagés plus équitablement.Le président Xi Jinping a assimilé la prospérité commune à la transformation de cette ? pyramide ? en une ? olive ?.

Pour atteindre cet objectif,il faudra que chacun y contribue.La démocratie populaire à processus complet,qui garantit les droits politiques,doit s’accompagner d’une responsabilité sociale dans son ensemble,qui détermine les devoirs correspondants.Ceux-ci s’appliquent non seulement aux gouvernements de tous les échelons et aux citoyens,mais aussi aux communautés locales,aux entreprises et même à la gouvernance mondiale.

La responsabilité sociale des entreprises– les organisations commerciales apportant leur expertise et d’autres ressources à des causes sociales– est importante,et est exigée en Chine depuis que la Loi sur les sociétés a été modifiée en 2005.Il convient toutefois de noter que les contributions des entreprises publiques sont deux fois plus élevées que celles des entreprises privées et des entreprises à capitaux étrangers.Cependant,l’objectif de prospérité commune de la Chine a été présenté dans certains médias étrangers,non pas comme un devoir moral,mais comme une attaque contre les profits commerciaux et une raison de plus de ne pas y investir.

Bien que la responsabilité sociale des entreprises soit importante,elle ne suffira pas à elle seule à assurer la prospérité commune.Les états-Unis,plus que tout autre pays à revenu élevé,s’appuient sur la générosité des entreprises et la philanthropie plut?t que sur la bienfaisance de l’état pour soutenir le bien-être social.Mais,au cours des 18 années précédant 2021,les inégalités de revenu aux états-Unis ont augmenté à partir d’un niveau déjà élevé,alors que celles de la Chine ont chuté,ce qui montre une richesse mieux partagée.

D’autres données viennent confirmer les progrès de la Chine vers la prospérité commune.Entre 2013 et 2021,la part des revenus du cinquième le plus riche de la population chinoise a chuté de 1,5 %,tandis qu’elle a augmenté de 4,4 % pour les deux cinquièmes les plus pauvres.Malgré cela,les revenus du cinquième le plus riche restent 10,2 fois supérieurs à ceux du cinquième le plus pauvre.Ce ratio des quintiles de revenus est plut?t élevé si on le compare à la moyenne de seulement 4,98 de la zone euro.

Des touristes dans les plantations de thé pour profiter du paysage printanier et cueillir du thé dans le village de Bailonghu (bourg de Conglin),à Chongqing

La responsabilité sociale individuelle signifie adopter des attitudes et des comportements favorables au bien commun.En Chine,comme ailleurs,de nombreuses personnes de la classe moyenne attribuent la pauvreté et l’échec à la paresse plut?t qu’à l’injustice sociale ou aux forces du marché débridées.Ceux qui mettent l’accent sur la paresse ont tendance à avoir des personnalités plus extraverties et autoritaires,ainsi que des attitudes sociales donnant la priorité au travail acharné et à l’intelligence comme raisons du succès.

Les personnes qui étudient les sciences humaines et sociales,ainsi que les arts,sont moins susceptibles d’attribuer l’échec économique au manque d’effort.Par conséquent,l’éducation favorisera peut-être le sens de responsabilité sociale individuelle nécessaire pour atteindre la prospérité commune.Cela peut signifier que la classe moyenne jouit d’une part plus faible de la richesse croissante de la Chine que par le passé.

Le président Xi Jinping accorde une grande importance à la responsabilité sociale de la communauté.Dans son rapport au XXeCongrès du Parti communiste chinois (PCC) en octobre 2022,il a souligné la nécessité de ? donner la priorité au peuple ?,d’? adopter la position du peuple ?,de ? répondre à ses aspirations ?,de ? respecter la créativité populaire ? et de ? puiser dans la sagesse des masses populaires ?.

La Chine a démontré la force de la responsabilité sociale collective durant sa campagne d’éradication de la pauvreté.De nouvelles stratégies sont nécessaires pour parvenir à la prospérité commune,comme l’a expliqué le président Xi dans son discours liminaire sur la sécurité sociale devant le Bureau politique du Comité central du PCC en 2021.La pondération des investissements stratégiques changera,favorisant la revitalisation rurale et une économie plus verte.Parallèlement,le développement du capital humain améliorera les compétences de la main-d’?uvre pour adopter une économie axée sur la technologie sans vaste secteur informel dépendant de bas salaires.

De telles politiques augmenteront les revenus du marché,engendrant davantage d’imp?ts pour faciliter de nouveaux investissements stratégiques et l’amélioration de la sécurité sociale et de la protection sociale que le président Xi a soulignée.Cette amélioration comprendrait une meilleure assistance sociale en milieu rural,une meilleure assurance sociale pour les travailleurs migrants et ceux dans l’économie à la tache,une meilleure coordination de l’assurance sociale au niveau provincial,ainsi que des services de santé et de protection sociale plus efficaces.

Une telle responsabilité sociale collective est nécessaire,mais pas encore suffisante pour atteindre la prospérité commune.Le bien-être de la Chine,comme celui des autres pays,dépend du commerce équitable et des relations internationales coopératives.

Avec un système commercial et des arrangements financiers qui profitent principalement aux pays riches au détriment des pays en développement,il y a un manque évident de responsabilité sociale internationale.L’intérêt national est invariablement placé au-dessus de la responsabilité sociale mondiale,comme l’illustre l’insuffisance des actions contre le changement climatique et le COVID-19,ainsi que pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies.

La responsabilité sociale,en tant que principe moral,ne peut ni être délimitée par les frontières nationales ni se borner aux communautés,aux entreprises et aux individus.Elle doit englober les relations internationales.

La Chine,engagée en faveur d’une communauté de destin pour l’humanité,donne l’exemple avec l’initiative ? la Ceinture et la Route ? et l’Initiative pour le développement mondial.Celles-ci sont basées sur la coopération économique et le développement,contrairement aux alliances conclues par les états-Unis qui recherchent un avantage militaire.

De toute évidence,une restructuration fondamentale de la gouvernance mondiale est nécessaire pour que les bénéfices de la croissance économique mondiale soient partagés plus équitablement et qu’une prospérité commune pour tous devienne réalité.